Ici, pas de robots qui s’agitent, pas de drones et autres gadget gourmands en énergie et en métaux rares. Derrière les immenses baies vitrées, on aperçoit de grandes serres dont le silence est troublé par les cris joyeux d’une vingtaine d’écoliers qui apprennent à distinguer les plantes aromatiques qui seront récoltées plus tard dans la journée.
Sur l’immense terrasse de la ferme, les plantations de fleurs sont bordées de ruches dont le miel sera collecté demain dans la matinée. Assis dans le restaurant panoramique, on peut observer les locataires de la maison de retraite avoisinante qui prennent leur déjeuner en commentant le bal des tracteurs électriques et l’oscillation paresseuse des éoliennes verticales.
C’est la régie agricole municipale qui est à l’origine de ce projet de ferme sans pétrole dont le succès n’est plus à démontrer. 4 fermes de ce type ont été créées sur la métropole et leurs productions alimentent sur chaque site un restaurant ouvert pour le déjeuner. Différents Chefs de la région s’y retrouvent régulièrement pour échanger sur la gastronomie locale et concevoir des menus servis quelques semaines plus tard dans les écoles de la ville. Les ventes de fleurs, de miel et de plantes aromatiques ainsi que la location des restaurants viennent ajuster un bilan financier parfois fragile mais chaque année plus stable.
L’objectif clairement affiché de ces fermes autonomes en énergie est de se passer d’outils à obsolescence programmée, de miser sur le choix des semences rustiques et des méthodes de cultures et de s’affranchir des technologies américaines et chinoises dominant le marché agroalimentaire. Tracteurs, séchoirs et frigos sont produits en France, ainsi que les éoliennes à axe vertical. Seuls les panneaux solaires et les batteries restent des produits d’importation indispensables à la production de 70% de l’énergie nécessaire à chaque ferme. Le recyclage des batteries automobiles utilisées sur l’aire urbaine devrait permettre de peu à peu limiter le besoin en lithium neuf.
Xavier Rival, Directeur de la ferme de Pech David commente : « Il y a la volonté d’une vraie innovation dans cette démarche, pas d’un effet de manche avec des drones qui pollinisent et des robots qui récoltent. Ce n’est pas non plus un projet pour hippie utopiste, c’est un acte pragmatique face à la hausse du prix du pétrole, les variations du climat ou la perte de biodiversité. Ce n’est pas un projet pédagogique même si des écoles viennent nous voir. Le but est de produire, d’avoir une rentabilité et d’ancrer un savoir faire agricole et gastronomique sur le territoire. Nous conservons également des semences rustiques locales que nous diffusons dans les jardins partagés de la ville pour éviter que les habitants ne les commandent sur internet à des groupes industriels. A quelques kilomètres d’’ici, nous avons l’INRA qui s’est longtemps orienté vers la production industrielle et qui se tourne maintenant vers des alternatives plus écologiques et éthiques. Leurs chercheurs nous aident à trouver notre voie entre permaculture, ferme verticale, production céréalière, culture potagère, plantes aromatiques et miel. Nous nous donnons 3 ans, soit 12 saisons pour nous stabiliser. Nous travaillons aussi avec des agriculteurs dans toute la région, autant de partenaires avec lesquels nous discutons chaque mois pour partager nos réussites, nos échecs, nos semences et quelques recettes pour les plus gourmands ! »